Brook Andrew: ngaay ngajuu dhugul birra (to see my skin broken)

24 Mai - 23 Juillet 2022 Faubourg Saint Honoré - Paris

La Galerie Nathalie Obadia est très heureuse de présenter ngaay ngajuu dhugul birra (à voir ma peau brisée), la quatrième exposition de Brook Andrew depuis le début de la collaboration entre l'artiste australien Wiradjuri et la galerie, initiée en 2014.

Né à Sydney en 1970, la parenté matrilinéaire de Brook Andrew provient de la nation aborigène Wiradjuri de l'ouest de la Nouvelle-Galles du Sud, en Australie, et c'est à travers la langue Wiradjuri qu'il conceptualise sa pratique. Brook Andrew est considéré comme un acteur majeur de la scène artistique et muséale contemporaine, dont le travail a acquis une amplitude internationale en près de 30 ans de carrière. L'artiste questionne la mémoire du colonialisme et propose des histoires alternatives. Ses oeuvres, ses interventions dans les musées et projets de commissariats remettent en question les limites imposées par les structures de pouvoir, l'amnésie historique et les stéréotypes pour valoriser les perspectives Indigènes. S'inspirant d'archives et d'objets vernaculaires, il collabore sur un plan international avec des artistes, des communautés et diverses collections privées et publiques. De cette oeuvre puissante, émergent des approches alternatives pour comprendre l'histoire afin de la «dé-coloniser».

Comme l'a exprimé Brook Andrew: "Les peintures et les sculptures mettent en scène la continuité d'une culture et de nouveaux imaginaires, présentant le processus difficile et empêché de l'accès à nos objets, tels qu'ils sont conservés et assemblés dans les musées. Cette installation crée un espace sécurisé, un exercice de guérison et un amour de soi radical dans une scène cérémonielle qui serait exempte de mauvais traitements, d'interprétations erronées et du romantisme infligé à notre culture. Les peintures s'inspirent des motifs de nos marrara guulany (sculptures d'arbres / dendroglyphes), et, avec les totems et l'ensemble de la mise en scène, présentent le pouvoir du processus et de la régénération de ce voyage complexe. La sculpture garru (pie) est basée sur mon totem personnel. Vous remarquerez qu'elle semble avoir été cassée, comme d'autres éléments des sculptures et des peintures qui ont été rompus, éventrés, ployés ou qui se sont affaissés. Le concept de «peau brisée» fait référence aux «skin connections» aborigènes (liés à la parenté et à la famille) et aux peaux réellement abîmées de nos corps et de nos objets dans les musées. L'assemblage de ce nouveau corpus parle de guérison active, afin de trouver de nouvelles manières de célébrer des cérémonies aujourd'hui. Ces figures totémiques sont également inspirées et liées aux personnages de la pièce de théâtre «GABAN» (étrange) qui sera jouée en septembre au Martin-Gropius- Bau, à Berlin.

Mon installation remet en question la manière dont l'époque actuelle dispose des éléments de culture aborigène dans les musées, exposés hors de tout contexte, dans une vaste étendue géographique. Ce profond manque de compréhension de la société aborigène et de ses pratiques contemporaines en trahit la diversité culturelle et linguistique - les propositions muséales représentent souvent nos cultures comme brisées et incomplètes, comme si nous et nos cultures étions brisés et n'avions que peu d'importance aujourd'hui.»

ngaay ngajuu dhugul birra (à voir ma peau brisée) s'inspire et se nourrit de la complexité des collisions entre les expériences vécues par la culture Wiradjuri et les modes de connaissance Indigènes avec l'institutionnalisation du musée et de l'espace public. Les totems, reliques, mandalas en céramique, bois, néons, pierre et marbre nous accueillent avec les huit oeuvres sur toile de la série Seeing Time dans un espace cérémoniel mis en scène.

Les oeuvres sur toile de la série Seeing Time évoquent la question du temps, de sa perception et de sa manipulation. À vocations contemplatives et reflexives, l'espace du tableau s'ouvre pour une expérimentation, une inscription dans cette mesure infinie. Pour Artforum (Janvier 2022) Helen Hughes observe également que «ce virage vers l'abstraction reflète peut-être le fait qu'en 2021, contrairement à ce qui s'est passé au début de la carrière de l'artiste, tous les musées du monde semblent aujourd'hui s'efforcer de décoloniser, ce qui permet à Andrew de faire un zoom arrière et de saisir une image plus large». Le motif Wiradjuri noir et blanc est directement inspiré de l'héritage aborigène (Wiradjuri) de l'artiste ; la forme abstraite témoigne de la force et de la continuité de cette pratique culturelle qui irrigue son oeuvre depuis ses débuts.

La désorientation spatiale et temporelle de cette scène est volatile, les appuis se dérobent à considérer ces juxtapositions et assemblages d'histoires complexes que Brook Andrew lient entres elles

-

Brook Andrew a été Directeur Artistique de NIRIN, la 22e Biennale de Sydney en 2020 et a participé à UN/LEARNING AUSTRALIA au Seoul Museum of Art & Artspace en 2021-22. Il fait partie de l'équipe curatoriale de On Caring, Reparing and Healing au Gropius Bau, Berlin, où il présentera également des oeuvres en septembre prochain et figure régulièrement dans le prestigieux The Power 100: the Most Influential People in the Artworld, du magazine britannique Art Review.



Brook Andrew observe un patient travail de recherche avec les communautés et les musées, minutieusement documenté par de nombreuses collaborations, invitations et résidences dans les musées et universités, notamment à vocation ethnologiques et anthropologiques (Musée du quai Branly - Jacques Chirac en 2016, Musée d'Ethnographie de Genève en 2017, Smithsonian Artist Research Fellow au Smithsonian Institute à Washington en 2017). Nombre de ses oeuvres, installations et commémorations adressent la question des possessions de musées, la restitution des restes humains et objets cérémoniels, et incluent des éléments d'archives (livres, cartes postales, objets) dont Brook Andrew a, au fil du temps, constitué une très vaste collection.



Lauréat de la Fondation Explora qui lui permet de mener un temps de résidence à la Cité des Arts à Paris - Brook Andrew a amorcé pour cette exposition des collaborations locales, notamment pour le travail en céramique avec Émile Degorce Dumas et ses assistants Clotilde Chirol Perrain et Ninon Enea, le graveur et sculpteur de pierre Vincent Voillat, l'artisan du bois et ébéniste Mark Jackson. Les collaborateurs de Brook Andrew en Australie, Cherie Schweitzer, Jessica Neath et Stewart Russel ont également participé au projet.